Des reportages diffusés à TVA et à l’émission La facture dans la semaine du 12 novembre 2018, ont suscité un nombre appréciable d’appels au Service technique et au Service juridique au sujet du revêtement SIFE (système d’isolation des façades avec enduit) et de l’état des bâtiments.Généralement, le Code de construction permet deux stratégies de défense pour protéger le bâtiment contre les intempéries. La première étant une étanchéisation de surface, et l’autre, un système à écran pare-pluie.
Étanchéisation en surface
Il s’agit du système le plus rudimentaire. Ce type de système ne possède qu’un seul plan de protection contre les précipitations. L’avantage est que l’état général du système est facile à évaluer, car il n’est caché par aucun autre élément. Par contre, celui-ci requiert une vigilance de la part du propriétaire qui doit en faire un entretien périodique.
En effet, toute défaillance dans le système, tel qu’une fissure au parement, un joint de calfeutrant desséché ou une fenêtre qui coule pourrait apporter de l’eau à l’intérieur de l’enveloppe. Aucun second plan de protection n’est prévu pour évacuer l’eau de celle-ci. L’eau resterait emprisonnée derrière le parement.
Les bâtiments avec revêtement SIFE ont souvent été installés de cette façon. En effet, la surface de l’enduit acrylique est imperméable, il n’y a aucun solin et toutes les jonctions sont religieusement scellées pour empêcher toute infiltration d’eau. Par contre, l’expérience a démontré que ce n’est pas le système de protection optimal avec ce type de revêtement.
Bien que l’enduit acrylique soit imperméable, il offre peu ou pas de résistance mécanique. Les pressions du vent, le fluage de la charpente et son retrait auront tôt fait de le faire fissurer. D’ailleurs, les manufacturiers recommandaient de faire des joints de contrôle afin que les fissures normales et prévisibles soient contrôlées. Ces fissures créent des portes d’entrée notables pour des infiltrations d’eau.
Puisque ce type de stratégie demande une connaissance et un calendrier d’entretien pour initiés, les murs étanchéisés en surface ne sont normalement pas recommandés dans les bâtiments dont le propriétaire n’est pas en mesure d’effectuer l’entretien nécessaire, ou s’il n’a pas les connaissances pour effectuer cet entretien. C’est pourquoi il n‘est plus permis, depuis septembre 2012, d’opter pour ce système de protection contre la pluie au Québec pour tout bâtiment qui abrite une habitation. Pour ces bâtiments, il faut opter pour le système à écran pare-pluie.
Système à écran pare-pluie
Un système à écran pare-pluie présente deux couches de protection contre les infiltrations d’eau. La première est constituée du revêtement extérieur. Bien que ce revêtement bloque la majorité des charges de précipitations, ce type de système prévoit qu’il y aura pénétration derrière la première protection. D’où l’utilité d’une deuxième couche combinant une membrane pare-pluie à des solins afin de capter les précipitations qui auront traversé le revêtement et de les évacuer vers l’extérieur.
Étant donné que le parement n’est pas la seule barrière contre l’infiltration d’eau dans ce type de système, il n’est pas possible de valider l’état du système pare-pluie, celui-ci étant caché derrière le parement. Il est donc difficile d’évaluer l’ensemble des éléments qui le compose, tels que les solins, la lame d’air et la membrane d’étanchéité.
Il est à noter que ce système requiert peu d’entretien, car son système de protection est protégé du vent et des UV par le parement. Comme ce type de système prévoit déjà que de l’eau traversera le parement extérieur, un mauvais entretien des mastics d’étanchéité est moins susceptible de créer des dommages au bâtiment, car la lame d’air de drainage et la membrane d’étanchéité devraient normalement capter et expulser l’eau hors de l’enveloppe.
Dans le cas d’un écran étanchéisé en surface, la défaillance d’un joint de calfeutrant serait fatale. Chaque goutte d’eau qui pénètre alors derrière le revêtement n’est plus gérée par l’enveloppe, ce qui peut entraîner la détérioration de celle-ci et même de l’ossature dans les pires cas.
Quels sont les indices à surveiller?
Les traces noires sur le revêtement résultent souvent de la formation d’algues sur des surfaces constamment humides. Elles sont un premier indice que les billes de polystyrène qui composent le substrat sont saturées d’eau. Si elles sont saturées d’eau, cela veut dire qu’il y a de l’eau derrière le revêtement.
Des coulisses brunâtres sur les murs de fondation sont un indice de détérioration avancée. C’est le signe que le revêtement intermédiaire, composé de panneaux de fibres orientées (OSB), se putréfie. Ces coulisses sont une sorte de « jus d’OSB » qui s’écoule vers le bas.
Les principaux endroits à surveiller sont les coins inférieurs des fenêtres, les jonctions toit/murs et tous les détails architecturaux où l’eau est concentrée. Les inspecteurs préachats auraient avantage à considérer ces éléments et à recommander fortement une inspection plus approfondie lorsqu’ils sont en présence de ces indices.
Que doit-on faire?
En construction neuve, le Code de construction du Québec n’a aucune prescription en ce qui concerne les revêtements SIFE. Plusieurs croient que les SIFE sont couverts par la section 9.28 Stucco, mais ce n’est pas le cas. Les SIFE n’étant pas inclus ni à la section 9.27 Revêtement extérieur, ni à la section 9.28 Stucco, il faut se référer par renvoi à la Partie 5 Séparation des milieux différents. Dans cette partie, il n’y a pas de prescription sur la méthode d’assemblage à utiliser, mais seulement un objectif. Par conséquent, il serait sage de se référer aux directives des manufacturiers, lorsqu’il en existe.
Même si ce n’est pas demain la veille que la version 2015 du CNB sera adoptée au Québec, nous recommandons également d’appliquer les exigences à la nouvelle sous-section 9.27.13 Systèmes d’isolation par l’extérieur avec enduit de finition. Celle-ci demande que la conception des SIFE soit conforme à la norme ULC-S716 et que leur installation soit conforme à la norme ULC-S716.2.
En réhabilitation de bâtiment, il est difficile de faire un devis qui s’applique pour tous les projets déjà construits. Par contre, il serait facile (mais pas responsable) d’écrire « arrachez tout et recommencez »! Si cela est requis dans certains cas où les dommages sont généralisés, il en est tout autrement lorsque l’on prend le problème au début de sa manifestation.
La majorité des infiltrations de précipitations à travers l’enveloppe s’effectuent au niveau des solins et des ouvertures. En prévention, il faut donc inspecter l’ensemble des joints de calfeutrage, idéalement deux fois par année (à l’automne et au printemps).
Sachant que l’eau pénètre particulièrement au niveau des ouvertures, une méthode d’intervention adéquate pourrait consister à retirer une bande de 4 po (100 mm) de large au périmètre des ouvertures, d’installer un solin au périmètre des ouvertures (autocollant au seuil et sur les jambages), et un solin métallique aboutissant à un larmier au-dessus des ouvertures. Le principe est de capter l’eau qui traverse le revêtement et de l’évacuer vers l’extérieur.
Ainsi, il ne serait pas requis de reprendre l’ensemble du revêtement. Seul le périmètre des ouvertures pourrait faire l’objet de correctifs. Pour ragréer le tout, il suffirait de poser des moulures architecturales au périmètre des ouvertures en effectuant la réparation au périmètre avec une bande d’isolant plus épaisse (1 1/2 po ou 38 mm).
Bref, pour les bâtiments existants, il faut être attentif aux signes indiquant un problème dans l’enveloppe en procédant ensuite avec minutie à des travaux correctifs. Pour les bâtiments neufs, il faut s’assurer de bien comprendre le concept de l’écran pare-pluie, de porter une attention particulière lors de l’exécution des travaux en chantier, d’aller au-delà de la simple réglementation actuellement applicable, et d’informer les clients que le choix d’un tel revêtement requiert un plan d’inspection visuel et d’entretien périodique.
Tirer du site APCHQ